Certes
Certes, il n’a pas envie de rire,
Il a plutôt envie d’gémir,
De s’faire petit, de se tasser.
Certes, il n’a pas envie de rire,
Il a plutôt envie d’se dire,
Qu’on s’ra bien rue des trépassés.
Dans la salle les gens applaudissent,
Ils gloussent de ses plaisanteries,
Ils s’écrient en choeur bis ! bis ! bis !
S’extasient de ses pitreries .
Mais lui, seul avec son pianiste
Et son répertoire à deux balles,
Il se sent fatigué et triste,
Il a le cœur lourd et bancal.
Certes, il n’a pas envie de rire,
Il a plutôt envie d’gémir,
De s’faire petit, de se tasser.
Certes, il n’a pas envie de rire,
Il a plutôt envie d’se dire,
Qu’on s’ra bien rue des trépassés.
Il se regarde chanter debout
Devant le public attentif,
Ça lui rapporte beaucoup de sous,
C’est un job très très lucratif.
Entre deux chansons sans saveur,
Avec son humour très tendance
Il fait marrer ses spectateurs,
A grand renfort d’impertinence.
Certes, il n’a pas envie de rire,
Il a plutôt envie d’gémir,
De s’faire petit, de se tasser.
Certes, il n’a pas envie de rire,
Il a plutôt envie d’se dire,
Qu’on s’ra bien rue des trépassés.
Bien sûr il doit faire illusion
Et cabotiner à outrance,
Toujours en représentation,
Il masque sa désespérance.
Et s’il fait pleurer c’est de rire
Avec ses vannes improvisées,
Car il n’a que c’la à offrir,
Pas de quoi se gargariser.
Certes, il n’a plus envie de rire,
Et même plus envie de gémir,
De s’faire petit, de se tasser,
Certes, il n’a plus envie de rire
Et il n’a plus rien à vous dire,
D’puis qu’il est rue des trépassés.