Cronos
Sur l’écran azuré du désert luxuriant,
Les yeux fermés je vois ton visage souriant
Et c’est plaisir à dire tout en train de silence,
Les bavardages muets tout en évanescence.
Et mon cœur n’a plus foi en sa vitalité,
Le présent est lointain, le futur est passé,
La lumière vivifiante trône sur le cimetière
D’un océan de terre ou fleurit la misère.
Sommes-nous sur la pente raide d’une plaine monotone,
Toute maquillée de blé que personne ne moissonne,
Il en va bien du temps des gestes doux et brutaux
Des marchands de discours qui déclament au château.
La pieuvre nous poursuit avec ses tentacules,
Faisant taire sans vergogne la chouette qui huhule
Et nos pieux souvenirs embrassent l’avenir
Puis retourne affronter les démons du partir.
O voyageur du temps que Cronos vous protège,
Qu’il vous épargne le sort d’une vie qu’on abrège,
Que les couloirs trop longs de notre course-poursuite
Enseignent à ceux qui restent une digne conduite.
Voyageur sédentaire et son chameau bossu
Transportant toutes ces guerres qui collent comme sangsues,
Faisant couler le sang de l’innocent poète
Qui poursuit néanmoins, certes, son éternelle quête.
Tu comprends rien, tu dis,
Au poème que tu lis,
Laisse tomber moi aussi
J’comprends plus c’que j’écris.